Organisées par Aflam, sous la direction artistique de Tahar Chikhaoui, les 2e Rencontres internationales des cinémas arabes, se tiendront à Marseille du 8 au 13 avril 2014 .
Cette session des Rencontres n’est pas que la seconde d’une manifestation qu’on voudrait pérenne, mais elle s’inscrit, comme nous l’avons voulu, dans une série d’actions qui se sont déployées tout le long de l’année selon un enchaînement progressif. Les dispositifs que nous avons mis en place (Aflam au lycée, Pour un dialogue citoyen autour du cinéma) et l’ajout d’une dimension participative aux traditionnels Ecrans d’Aflam nous ont permis de préparer nos publics, notamment les publics populaires et scolaires, à ce grand rendez-vous d’avril et les membres des différents ateliers (réalisation, rédaction, programmation, jury) aux tâches qui les attendent. Les Rencontres seront ainsi l’aboutissement festif d’un parcours, comme la kermesse d’une école populaire. Les Rencontres demeurent, cependant, l’occasion pour le public marseillais d’avoir des nouvelles de la rive sud de la Méditerranée, du Maghreb, du Moyen-Orient et du Golfe, des nouvelles différentes de celles, sommaires et étriquées, qui sont volontiers ressassées par une paresseuse machine médiatique. Celle-ci s’est d’ailleurs empressée de revenir aux vieux clichés aussitôt que les changements enclenchés en 2011 ont rencontré les problèmes que l’on connaît. Du grand et précautionneux cinéaste syrien Mohamad Malas au jeune et fulgurant cinéaste égyptien Ahmed Abdalla en passant par l’inattendue saoudienne Shahad Ameen (pour ne citer que ceux-là mais la liste est longue), des images étonnantes nous sont proposées qui autoriseront une autre perception de ce qu’on croit savoir de cette partie du monde. Mais la vocation fondamentale des Rencontres demeure la découverte des jeunes talents. Encore une fois, il ne s’agit pas d’une expédition d’ambassadeurs chargés d’une représentation moyenne de leurs sociétés, camouflant honteusement toute aspérité, mais de fortes singularités qui sont souvent peu visibles, à cause précisément de la force de leur singularité. Des cinéastes qui ne représentent pas ce qui est ou ce qui est censé être mais présentent ce qui pourrait être, ne posent pas un regard juste mais proposent juste un regard. Pour les choisir, nous sommes sortis des carcans institutionnels (courts, documentaires, fictions) et partis au-delà des catégories culturelles (films militants, films de femmes, films classiques, films modernes). De l’oeuvre qui dure sept minutes filmée en un seul plan (tel le magnifique Light horizon de Randa Meddah) à l’époustouflante exploration de Révolution Zendj qui dépasse les deux heures, nous avons pris essentiellement en considération la force de la proposition. Et si Faouzi Bensaidi a été l’élu de la section Un cinéaste, un parcours, c’est précisément parce que sa trajectoire, évitant les linéarités répétitives, est faite de bonds aussi inattendus qu’enjoués, marqués à chaque fois, par une audace et une liberté rares, on aurait ajouté exemplaires si l’exemplarité n’était pas étrangère à son univers. C’est pour prendre la mesure de ce renouveau que les Rencontres doivent rester, avant et après tout, un lieu d’échange et de débats. Ainsi avons-nous choisi d’inviter tous les cinéastes, et ceux qui ne sont pas présents n’ont pas pu venir. Nous leur avons demandé, ce qu’ils ont accepté volontiers, de se prêter au jeu d’un débat animé à chaque fois par un critique avisé pour une circulation intelligente de la parole. Une parole déclinée différemment selon les sections, jamais techniciste ni académique, mais toujours conviviale et profonde grâce à la qualité des critiques invités et des personnalités sollicitées aux tables rondes. Enfin, et tel n’est pas le dernier trait distinctif de cette session, l’esprit d’ouverture et le croisement des regards, principe structurant des Rencontres, ne sera pas un voeu pieux : La présence d’une partie importante de l’oeuvre de Mahamat- Saleh Haroun n’est pas seulement de nature à ajouter plus de valeur à la qualité des films proposés ; elle dessinera, grâce à l’étendue de son univers, de nouvelles lignes de fuite dans le large horizon de la sélection : un cinéaste exigeant, qui au lieu de se donner un air docte ou doctrinaire (tentations faciles dans le contexte de rareté où il se trouve) a choisi l’humilité en se laissant porter avec grâce par l’obsession créatrice de la filiation.
Tahar Chikhaoui – Directeur artistique 2014 – Edito
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